Cerro Torre 2015 10/01/2015

Première ascension en libre d’une cordée féminine au Cerro Torre

Nous sommes mi-février, et je prends l’avion en direction de la Patagonie argentine. C’est la troisième saison de suite que je viens ici. Cette fois-ci avec un grand rêve: grimper le Cerro Torre.

Il y à trois ans déjà, lors d’une précédente expédition en Patagonie avec Laure Batoz, nous avions du faire demi-tour alors que nous étions seulement deux longueurs sous le sommet. Depuis, cette ascension est restée dans ma tête comme un grand objectif.

Une année plus tard, de retour sur les lieux et malgré deux mois à El Chalten, aucun créneau météo ne m’avait permis de faire une tentative. Le mauvais temps fait parti de la réalité patagonienne, et ne pouvant rien y changer, il a fallu apprendre à l’accepter.

Mais cette année, nous avons eu beaucoup plus de chance. En effet, la météo à été assez bonne dès notre arrivée à El Chalten. Un créneau de beau temps nous a tout de suite permis d’entreprendre une première voie de grimpe avec Nastja Davidova, une copine slovène. Nous profitons de ces jours sans vent pour faire la voie Claro di Luna jusqu’au sommet de la St Exupéry, une voie incroyable de 20 longueurs en parfait granite.

Par la suite, le climat semble rester clément et c’est avec Christina Huber, une copine de l’équipe d’expédition allemande, que je repars en montagne, mais cette fois-ci, en direction de la face ouest du Cerro Torre.

Le chemin est long: il nous faut marcher trois jours avant d’atteindre le pied de l’Elmo, qui constitue la première longueur raide de la face ouest et où nous installons notre dernier bivouac.
Durant ces trois jours, nous avons marché de longs kilomètres sur les vastes et déserts glaciers continentaux de la Patagonie sans croiser une seule âme humaine.

Le lendemain, nous commençons à grimper de nuit et le soleil ne se lève qu’une fois après avoir attaqué les longueurs de mixed. Notre progression est rapide grâce à notre grimpe en réversible et elle nous mène jusqu’au Headwall. L’Headwall constitue la partie la plus raide de la voie. Tout en luttant contre le lactate dans nos bras, nous arrivons à enchainer cette partie et cela nous rend plus qu’heureuses.

Notre motivation est plus que jamais présente, mais faut-il encore franchir les trois champignons de neiges sommitales. Nous trouvons même un tunnel pour passer celui du milieu.

Après ces longues journées de marche et de grimpe acharnée, nous arrivons finalement à la dernière longueur. Celle-ci constitue la crux de la voie: de la neige raide non consolidé. Mais nous avons de la chance, nous trouvons déjà des traces des cordées qui l’ont grimpé au paravent dans la saison. Cela nous est d’une grande aide, mais il nous faut tout de même rester très prudentes, car de bons ancrages ne sont pas possibles sur les dix premiers mètres.
Après dix heures de grimpe nous sommes enfin au sommet du Cerro Torre, sans vent et avec une vue magnifique sur tout le massif !

Nous n’y restons pas trop longtemps, car une longue descente nous attend. Nous devons encore tirer de nombreux rappels pour redescendre sur le glacier du Circulo de los Altares. Il est passé minuit lorsque nous posons les pieds sur ce dernier. Nous décidons tout de même de faire une pause où nous profitons de manger et de dormir une petite heure, avant d’entamer la longue marche de retour jusqu’à El Chalten. Malgré les très fortes rafales de vents, nous prenons 20 heures jusqu’à El Chalten. C’est ainsi qu’avec seulement une seule heure de sommeil durant ces dernières 48 heures que nous venons de réaliser un grand rêve exceptionnel. Nous sommes épuisées, mais plus que jamais heureuses.

Merci à Mammut, Katadyn et Marmot de nous avoir soutenu pour ce projet.

Les photo:

Christina Huber, Luka Lindic et Caro North

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